Est-il Temps d’Acheter un Bien Immobilier Avant la Fin de la Baisse des Taux ? Insights Experts

Le marché immobilier français traverse une période de turbulence sans précédent. Après des années de taux d’intérêt historiquement bas ayant propulsé les prix à des sommets, nous assistons maintenant à une phase de réajustement. La remontée des taux amorcée en 2022 a refroidi le marché, mais un nouveau changement se profile à l’horizon : les banques centrales envisagent désormais d’assouplir leur politique monétaire. Cette perspective soulève une question fondamentale pour les investisseurs et futurs propriétaires : faut-il acheter maintenant, avant que les taux ne recommencent à baisser et que les prix ne repartent potentiellement à la hausse ? Analysons ce dilemme à travers les perspectives des experts du secteur.

La dynamique actuelle des taux immobiliers : comprendre les signaux du marché

Pour saisir l’enjeu de cette question, il faut d’abord comprendre le contexte actuel du marché des taux immobiliers en France. Après avoir atteint des niveaux historiquement bas (autour de 1% sur 20 ans) jusqu’en 2021, les taux d’intérêt ont connu une remontée spectaculaire en 2022 et 2023, dépassant les 4% pour certains profils d’emprunteurs.

Selon Michel Mouillart, professeur d’économie et observateur du marché du logement : « Nous sommes probablement au sommet du cycle de hausse des taux. Les signaux envoyés par la Banque Centrale Européenne laissent présager un assouplissement monétaire dans les prochains trimestres, ce qui devrait se répercuter progressivement sur les taux immobiliers. »

Cette analyse est confirmée par les données récentes. En mars 2024, plusieurs établissements bancaires ont commencé à réviser légèrement leurs barèmes à la baisse. Le taux moyen pour un prêt sur 20 ans est passé de 4,20% en janvier à 4,05% fin mars, selon l’Observatoire Crédit Logement/CSA.

Cette inflexion s’explique par plusieurs facteurs convergents :

  • Le ralentissement de l’inflation en zone euro (2,4% en mars 2024 contre 6,9% un an plus tôt)
  • La stabilisation des taux directeurs de la BCE depuis septembre 2023
  • La baisse des taux d’emprunt d’État français (OAT 10 ans) qui servent de référence
  • La volonté des banques de relancer leur production de crédit immobilier après une année 2023 morose

Sandrine Allonier, porte-parole du courtier Vousfinancer, note que « la concurrence entre établissements bancaires s’intensifie à nouveau. Après une période où elles limitaient volontairement leur production de crédits immobiliers, les banques cherchent maintenant à reconquérir des parts de marché, ce qui favorise une détente des conditions d’octroi. »

Cette dynamique se traduit concrètement par une amélioration graduelle des conditions d’emprunt. Les meilleurs profils peuvent désormais négocier des taux inférieurs à 3,70% sur 20 ans, contre plus de 4% il y a quelques mois. Cette tendance devrait s’accentuer dans les prochains mois, avec une prévision de taux moyens autour de 3,5% d’ici fin 2024 selon plusieurs analystes du secteur.

Toutefois, Henry Buzy-Cazaux, président de l’Institut du Management des Services Immobiliers, tempère cet optimisme : « La baisse des taux sera progressive et limitée. Nous ne reviendrons pas aux niveaux artificiellement bas de la période 2015-2021, qui étaient liés à une politique monétaire exceptionnelle. Un nouveau palier s’établira probablement autour de 3% pour les taux moyens à long terme. »

L’évolution des prix immobiliers : un marché en phase d’ajustement

Le contexte des taux ne constitue qu’une partie de l’équation. L’autre variable fondamentale est l’évolution des prix de l’immobilier. Ces derniers ont connu une correction après des années de hausse continue, sous l’effet conjugué de la remontée des taux et de la dégradation du pouvoir d’achat immobilier.

D’après les données des Notaires de France, les prix des logements anciens ont reculé de 3,8% sur un an au quatrième trimestre 2023. Cette baisse est plus marquée dans certaines métropoles comme Lyon (-7,2%), Bordeaux (-6,5%) ou Paris (-5,7%). C’est la première correction significative observée depuis la crise financière de 2008.

Thomas Lefebvre, directeur scientifique de MeilleursAgents, explique : « Nous assistons à un rééquilibrage du marché après une décennie de hausse quasi ininterrompue. Cette correction était nécessaire pour absorber le choc de la remontée des taux. L’amplitude de l’ajustement varie considérablement selon les territoires, avec des baisses plus prononcées dans les zones où les prix avaient le plus augmenté. »

Plusieurs facteurs structurels alimentent cette tendance :

  • La perte de pouvoir d’achat immobilier des ménages (environ -25% depuis 2021)
  • L’attentisme des acheteurs qui anticipent des baisses supplémentaires
  • Le durcissement des conditions d’octroi de crédit (taux d’endettement limité à 35%)
  • L’augmentation du nombre de biens mis en vente, notamment dans le cadre de la rénovation énergétique obligatoire

La question qui se pose maintenant est de savoir si cette correction va se poursuivre et à quel rythme. Jean-Marc Torrollion, président de la FNAIM, anticipe « une poursuite de l’ajustement des prix en 2024, avec une baisse moyenne nationale de l’ordre de 5%, avant une possible stabilisation en 2025 si les taux d’intérêt commencent effectivement à refluer ».

Cette prévision est partagée par Loïc Cantin, président de la Chambre des Notaires de Paris : « Nous observons un marché qui cherche son point d’équilibre. Les vendeurs ont progressivement intégré la nouvelle réalité des prix, mais l’ajustement n’est pas terminé dans certains secteurs géographiques où l’écart entre les attentes des vendeurs et la capacité financière des acheteurs reste significatif. »

Un élément déterminant sera l’évolution du volume des transactions. Celui-ci a chuté d’environ 22% en 2023 par rapport à 2022, avec 875 000 ventes dans l’ancien contre plus d’un million les années précédentes. Cette contraction du marché exerce une pression à la baisse sur les prix, les vendeurs devant consentir des rabais pour finaliser leurs transactions.

À noter que ces tendances nationales masquent d’importantes disparités locales. Les marchés tendus des grandes métropoles et des zones littorales attractives montrent une meilleure résistance que les zones rurales ou les villes moyennes moins dynamiques économiquement.

Le pouvoir d’achat immobilier : l’équation taux-prix

Au-delà des tendances brutes des taux et des prix, c’est l’évolution du pouvoir d’achat immobilier qui constitue l’indicateur le plus pertinent pour déterminer l’opportunité d’acheter. Cette notion combine l’effet des taux d’intérêt et des prix pour mesurer la surface que peut acquérir un ménage avec un budget donné.

La détérioration du pouvoir d’achat immobilier a été spectaculaire depuis 2021. Pour un ménage disposant d’un revenu médian (environ 3 500 € nets mensuels) et empruntant sur 20 ans, la capacité d’emprunt est passée d’environ 280 000 € en 2021 (avec un taux à 1,2%) à 210 000 € début 2024 (avec un taux à 4%), soit une baisse de 25%.

Pierre Chapon, président du courtier Pretto, analyse : « La baisse des prix que nous observons actuellement ne compense que partiellement la hausse des taux. Dans la plupart des marchés, le pouvoir d’achat immobilier reste inférieur à celui de 2021, mais la situation s’améliore progressivement. Chaque dixième de point de baisse des taux augmente la capacité d’emprunt d’environ 1%, tandis que chaque point de baisse des prix améliore mécaniquement le pouvoir d’achat dans les mêmes proportions. »

Cette analyse peut être illustrée par un exemple concret :

  • En 2021 : avec 1 000 € de mensualité sur 20 ans à 1,2%, un acheteur pouvait emprunter 210 000 € et acquérir un bien de 60 m² à 3 500 €/m²
  • Début 2023 : avec les mêmes 1 000 € de mensualité mais un taux à 3,5%, la capacité d’emprunt chutait à 170 000 €, permettant d’acquérir seulement 48,5 m² au même prix
  • Début 2024 : avec un taux à 4% mais des prix en baisse de 5% (3 325 €/m²), la superficie accessible remonte légèrement à 49 m²
  • Projection fin 2024 : avec un taux à 3,5% et des prix en baisse de 8% (3 220 €/m²), la superficie accessible pourrait atteindre 53 m²

Ce calcul simple montre que le marché est en train de retrouver progressivement un meilleur équilibre, même si le pouvoir d’achat immobilier reste inférieur à son niveau de 2021.

Barbara Castillo Rico, responsable des études économiques chez SeLoger, souligne que « l’amélioration du pouvoir d’achat immobilier passe par deux leviers : la baisse des prix et celle des taux. Le premier mécanisme est déjà bien engagé, le second commence tout juste à se manifester. La conjonction des deux pourrait créer une fenêtre d’opportunité pour les acheteurs au second semestre 2024. »

Cette analyse est partagée par Charles Marinakis, président de Century 21 France : « Nous observons un retour progressif des acquéreurs sur le marché, notamment les primo-accédants qui avaient été les plus touchés par la hausse des taux. Ce mouvement devrait s’amplifier si la baisse des taux se confirme, car beaucoup de projets ont été mis en attente ces derniers mois. »

Un élément à prendre en compte dans cette équation est l’évolution des revenus des ménages. Dans un contexte d’inflation, les salaires ont augmenté en moyenne de 4,5% en 2023, ce qui contribue à améliorer la capacité d’achat immobilière, même si cette hausse ne compense pas entièrement l’effet de la remontée des taux.

L’analyse stratégique : acheter maintenant ou attendre ?

Face à ces différentes tendances, quelle stratégie adopter ? Faut-il acheter dès maintenant ou patienter encore quelques mois ? Les avis des experts divergent sur cette question, mais plusieurs facteurs peuvent guider la décision.

Olivier Lendrevie, président du courtier Cafpi, distingue plusieurs profils d’acheteurs : « Pour les acquéreurs qui ont un projet de long terme et qui ont identifié le bien correspondant parfaitement à leurs besoins, attendre n’est pas forcément la meilleure stratégie. En revanche, pour les investisseurs ou les acheteurs ayant une certaine flexibilité, un positionnement plus attentiste peut se justifier pour bénéficier d’une possible amélioration des conditions de marché. »

Cette analyse peut être affinée selon plusieurs critères :

Le facteur géographique

La dynamique des prix varie considérablement selon les territoires. Dans les zones où la baisse des prix est déjà bien engagée (grandes métropoles comme Paris, Lyon ou Bordeaux), le potentiel de correction supplémentaire semble limité. À l’inverse, dans les marchés où les prix ont mieux résisté jusqu’à présent, l’ajustement pourrait se poursuivre plus longtemps.

Sophie Desmazières, directrice générale du réseau Orpi, observe que « dans les centres-villes des grandes métropoles et les zones littorales très recherchées, les biens de qualité continuent de se vendre rapidement et sans décote majeure. La rareté de l’offre dans ces secteurs limite le potentiel de baisse des prix. En revanche, dans les secteurs périurbains ou ruraux, les négociations sont plus âpres et les délais de vente s’allongent. »

Le type de bien

La performance énergétique est devenue un critère déterminant. Les biens énergivores (classés F ou G au DPE) subissent une décote croissante, qui devrait s’accentuer avec l’interdiction progressive de leur mise en location. À l’inverse, les logements économes en énergie (A, B ou C) conservent mieux leur valeur.

Yann Jéhanno, président de Laforêt, constate que « l’écart de prix entre un bien performant énergétiquement et un logement énergivore peut atteindre 15% à 20% à caractéristiques équivalentes. Cette différence tend à s’accentuer, créant un marché à deux vitesses. »

Le profil de l’acheteur

Les primo-accédants peuvent avoir intérêt à se positionner dès maintenant s’ils identifient un bien correspondant à leurs critères avec un prix déjà négocié. La stabilisation des taux, voire leur légère baisse, combinée à des prix en repli, crée une fenêtre d’opportunité pour ceux qui ont vu leur projet bloqué en 2022-2023.

Pour les investisseurs, la situation est plus nuancée. Christine Fumagalli, présidente du réseau Orpi, recommande « d’être particulièrement vigilant sur l’emplacement et la qualité du bien. Dans un marché en correction, seuls les actifs de qualité conserveront leur valeur à long terme. La rentabilité locative s’est améliorée avec la baisse des prix, mais reste sous pression dans les grandes villes où les loyers progressent moins vite que l’inflation. »

Les secundo-accédants (déjà propriétaires qui souhaitent changer de logement) font face à un dilemme spécifique : vendre d’abord leur bien actuel dans un marché baissier, ou acheter leur nouveau logement avant de vendre. Brice Cardi, président du réseau L’Adresse, conseille « de privilégier la vente avant l’achat dans un marché baissier, afin de connaître précisément son budget et de ne pas se retrouver avec deux crédits si la vente de l’ancien logement prend plus de temps que prévu. »

Le timing de la baisse des taux

L’anticipation de la trajectoire future des taux constitue un élément clé de la décision. Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi, estime que « la baisse des taux sera progressive, avec un premier mouvement significatif au second semestre 2024, qui pourrait s’accélérer en 2025. Toutefois, les emprunteurs ne doivent pas espérer un retour aux taux historiquement bas de 2019-2021. Un nouveau palier s’établira probablement autour de 3% pour les meilleurs profils. »

Cette anticipation suggère qu’attendre quelques mois pourrait permettre de bénéficier de conditions de financement plus favorables. Néanmoins, si les taux commencent effectivement à baisser de manière significative, la demande pourrait se réactiver rapidement, ce qui limiterait le potentiel de négociation sur les prix.

Perspectives pour 2024-2025 : anticiper les prochaines phases du marché

Au-delà de la question immédiate « faut-il acheter maintenant ? », il est pertinent d’examiner les perspectives du marché immobilier à moyen terme pour éclairer la prise de décision.

Selon Jean-François Buet, ancien président de la FNAIM et analyste du marché immobilier, « nous sommes entrés dans une phase de transition qui pourrait durer 12 à 18 mois. Après la correction actuelle, le marché devrait se stabiliser puis reprendre une trajectoire haussière modérée, tirée par la reprise démographique et le déficit structurel de logements en France. »

Cette analyse s’appuie sur plusieurs tendances de fond qui devraient façonner le marché immobilier dans les prochaines années :

Le déficit structurel de logements

La France continue de faire face à un déficit de construction neuve. Avec moins de 300 000 logements mis en chantier en 2023 (contre un besoin estimé à 400 000 unités annuelles), la tension sur le parc existant reste forte, particulièrement dans les zones tendues. Cette inadéquation entre l’offre et la demande limite le potentiel de baisse prolongée des prix.

Emmanuelle Wargon, ancienne ministre du Logement, souligne que « la crise de production dans le secteur du logement neuf va accentuer les tensions sur le marché de l’ancien dans les zones attractives. À moyen terme, cette pénurie constituera un facteur de soutien des prix. »

La transition énergétique

L’entrée en vigueur progressive des restrictions de location pour les logements énergivores va transformer le marché. Dès 2025, les logements classés G seront interdits à la location, suivis par les F en 2028 et les E en 2034.

Thierry Marchand, président de la Chambre des Diagnostiqueurs Immobiliers, prédit « une accélération des travaux de rénovation énergétique et une recomposition du parc, avec une prime croissante pour les biens performants. Les propriétaires qui auront anticipé ces évolutions seront avantagés, tandis que ceux qui reportent les travaux nécessaires subiront des décotes croissantes. »

L’évolution démographique

Les changements sociétaux continuent d’influencer le marché immobilier. Le vieillissement de la population, l’augmentation du nombre de divorces et la diminution de la taille des ménages alimentent une demande soutenue pour les logements de petite et moyenne surface.

Séverine Amate, porte-parole du groupe SeLoger, note que « les T2 et T3 bien situés restent les biens les plus recherchés et ceux qui résistent le mieux à la correction des prix. Cette tendance devrait se poursuivre, portée par l’évolution des modes de vie et le développement du télétravail. »

La politique monétaire à moyen terme

Après une période exceptionnelle de taux ultra-bas, puis un cycle de resserrement rapide, la politique monétaire devrait se normaliser progressivement. Éric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG School of Management, anticipe « un retour à des taux d’intérêt réels légèrement positifs à moyen terme, avec des taux nominaux pour les crédits immobiliers qui se stabiliseraient autour de 3% à 3,5%, soit un niveau proche des moyennes historiques de long terme. »

Cette normalisation pourrait contribuer à un fonctionnement plus sain du marché immobilier, avec une progression des prix plus en ligne avec l’évolution des revenus des ménages, contrairement à la période 2015-2021 où la hausse des prix avait largement déconnecté le marché des fondamentaux économiques.

Face à ces perspectives, Henry Buzy-Cazaux recommande « une approche pragmatique et individualisée. La décision d’acheter doit s’appuyer sur une analyse fine des besoins personnels, des capacités financières et des caractéristiques du marché local, plutôt que sur des considérations spéculatives à court terme. »

Cette vision est partagée par Bernard Cadeau, ancien président du réseau Orpi : « L’immobilier reste avant tout un investissement de long terme. Les fluctuations conjoncturelles des taux et des prix ne doivent pas occulter l’essentiel : acquérir un bien qui répond durablement à ses besoins ou qui présente des fondamentaux solides en termes d’emplacement et de qualité intrinsèque. »

Prendre une décision éclairée : les facteurs déterminants

Au terme de cette analyse, il apparaît que la question « faut-il acheter maintenant ou attendre la fin de la baisse des taux ? » ne peut recevoir une réponse unique et universelle. La décision doit être personnalisée en fonction de multiples critères.

Pour aider les futurs acquéreurs à naviguer dans ce contexte incertain, voici une synthèse des facteurs à prendre en compte :

L’horizon temporel du projet

L’immobilier reste fondamentalement un investissement de long terme. Sébastien de Lafond, fondateur de MeilleursAgents, rappelle que « sur une période de détention de 7 à 10 ans, les variations conjoncturelles tendent à s’estomper. Si votre projet s’inscrit dans cette durée, le timing précis de l’achat a moins d’importance que la qualité intrinsèque du bien. »

Cette perspective est particulièrement pertinente pour les acquéreurs en résidence principale, dont la motivation première est de se loger plutôt que de réaliser une plus-value à court terme.

La qualité du bien et son emplacement

Dans un marché en phase d’ajustement, la sélectivité devient primordiale. Les biens présentant des défauts (mauvaise localisation, performance énergétique médiocre, configuration obsolète) subissent les corrections de prix les plus sévères.

Olivier Alonso, président du groupe Nestenn, souligne que « les biens d’exception ou ceux situés dans des emplacements prisés continuent de susciter des enchères, même dans un contexte de marché ralenti. À l’inverse, les biens standards ou présentant des défauts nécessitent des décotes significatives pour trouver preneurs. »

La capacité de négociation

Le rapport de force entre acheteurs et vendeurs s’est inversé après des années favorables aux seconds. Corinne Jolly, présidente de PAP.fr, constate que « les acheteurs disposent aujourd’hui d’un pouvoir de négociation qu’ils n’avaient pas depuis longtemps. Les délais de vente s’allongent (92 jours en moyenne début 2024 contre 64 jours en 2021) et les rabais consentis atteignent souvent 5% à 10% du prix affiché. »

Cette situation offre une opportunité pour les acquéreurs bien préparés, capables d’identifier les vendeurs pressés et de négocier efficacement.

L’anticipation des évolutions réglementaires

Les changements législatifs peuvent avoir un impact significatif sur la valeur des biens. Outre la réglementation énergétique déjà mentionnée, d’autres évolutions sont à surveiller, comme les restrictions sur la location touristique dans certaines villes ou l’encadrement des loyers.

Danielle Dubrac, présidente de l’UNIS (Union des Syndicats de l’Immobilier), recommande « une veille attentive sur les évolutions réglementaires locales et nationales, qui peuvent modifier substantiellement la rentabilité d’un investissement ou la valeur d’un bien. »

La capacité financière et les conditions d’emprunt

Au-delà des taux d’intérêt, c’est l’ensemble des conditions d’accès au crédit qui doit être pris en compte. Maël Bernier, directrice de la communication de Meilleurtaux, observe que « les banques assouplissent progressivement leurs critères, notamment pour les bons profils. L’apport personnel minimum exigé, qui avait atteint 20% dans certains établissements, revient progressivement vers 10%, facilitant l’accès au crédit pour les primo-accédants. »

Cette évolution, combinée à la stabilisation puis à la baisse attendue des taux, pourrait créer une fenêtre d’opportunité pour les emprunteurs à partir du second semestre 2024.

À l’issue de cette analyse, il apparaît que le moment peut être propice pour certains profils d’acheteurs, particulièrement ceux qui ont identifié un bien de qualité correspondant précisément à leurs besoins et disposant d’une bonne capacité de négociation. Pour d’autres, notamment les investisseurs recherchant une optimisation financière maximale, une position d’attente peut se justifier quelques mois encore.

Christophe Bacqué, président de la FNAIM Grand Paris, résume bien la situation : « Nous sommes dans une phase transitoire du cycle immobilier. Ni le moment de panique où il fallait absolument attendre, ni celui d’euphorie où il fallait acheter à tout prix. C’est une période où l’analyse rationnelle, personnalisée et dépassionnée doit prévaloir. »

La décision d’acheter maintenant ou d’attendre quelques mois dépend finalement moins du timing macroéconomique que de la qualité de l’opportunité identifiée et de l’adéquation du bien avec son projet de vie ou d’investissement à long terme.